MedSensors : un laboratoire commun entre ITODYS et ValoTec sur les capteurs médicaux
Le laboratoire commun MedSensors vise à développer des patchs fabriqués par impression numérique pouvant se coller aussi bien directement sur la peau des patients que sur des appareils de mesure.
Forts de près de dix ans de collaboration, le laboratoire Interfaces, traitements, organisation et dynamique des systèmes (ITODYS, CNRS/Université Paris Cité) et l’entreprise ValoTec se sont associés pour fonder le LabCom MedSensors, consacré à l’industrialisation de microcapteurs connectés et imprimés pour le secteur de la santé. MedSensors est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR) à hauteur de 363 000 euros pour une durée minimale de quatre ans.
L’impression numérique au service de la santé
Ce laboratoire commun explore les procédés d’impression multi échelles, allant du nanomètre à plusieurs centaines de micromètres, pour créer des capteurs avancés. Ces derniers sont ainsi dotés d’une électronique embarquée et d’une chaîne de traitement de données sophistiquée.
« J’ai toujours été versé dans la R&D sur les capteurs et biocapteurs en collaboration avec des entreprises, affirme Benoit Piro, professeur à l’Université Paris Cité et membre d’ITODYS. Je développe depuis une quinzaine d’années des dispositifs électroniques semi-conducteurs, notamment de type transistor, obtenus par impression numérique. Cette approche, qui ressemble aux techniques classiques d’impression à jet d’encre, repose sur des encres fonctionnalisées pour être conductrices, semi-conductrices ou isolantes. Elles forment ainsi des composants électroniques organiques. »
Cette méthode permet d’imprimer sur des supports souples en polymères ou des autocollants, soit pour placer les capteurs directement au contact de l’organe (par exemple, la peau), soit pour apporter de nouvelles fonctions à des appareils déjà existants sur lesquels on vient ajouter le patch. L’idée étant alors d’améliorer ces dispositifs, grâce aux capteurs, sans avoir à les redévelopper.
Benoit Piro et ses collègues travaillent principalement sur des applications dans la santé humaine et environnementale. Ils ont par exemple développé des capteurs de gaz ou d’humidité des sols, ainsi qu’un pansement qui suit la cicatrisation et l’absence d’invasion bactérienne d’une plaie. Des études sont également en cours sur un capteur qui identifie les pH anormaux dans la salive ou sur certaines zones du corps.
« Il y a un fort intérêt sur ces technologies d’impression numérique, affirme Jean-Christophe Lourme, président de ValoTec. Elles offrent des capteurs économiques, avec moins de gaspillage, et passent facilement à l’échelle industrielle. » Deux projets ont déjà été lancés au sein du laboratoire commun, traitant respectivement de l’état de stress et de fatigue du sportif, via l’analyse de sa sueur, et ceux du patient.
« Bien qu’il s’agisse d’un des fluides physiologiques les plus simples, étudier la composition de la sueur reste l’équivalent de distinguer une aiguille dans une botte de foin, reconnaît Benoit Piro. Par ailleurs, nous avons des verrous techniques à lever ensemble, comme savoir comment imprimer plusieurs encres différentes avec la même qualité, ou concilier les capteurs souples avec la rigidité relative des supports électroniques en silicium. »

© Benoit Piro
Une synergie construite sur la durée
Les liens entre ITODYS et ValoTec remontent à 2016. Ils s’étaient alors associés pour répondre à un appel à Projets de recherche et développement structurants pour la compétitivité (PSPC), lancé par Bpifrance et traitant de la mesure de la glycémie chez des patients diabétiques. De premiers échanges d’ingénieurs avaient alors eu lieu entre les deux structures. Elles ont continué à travailler ensemble sur un pansement intelligent. « Ce LabCom est le fruit d’une collaboration déjà existante sur la durée, souligne Jean-Christophe Lourme. Le format LabCom permet de constituer une véritable équipe commune pour porter de nouvelles solutions et trouver des clients. »
« Les équipes de ValoTec sont des électroniciens et des programmeurs, tandis que nous sommes un laboratoire de physico-chimie, décrit Benoit Piro. Or il faut réunir toutes ces compétences pour obtenir un capteur à reconnaissance moléculaire complet. Le LabCom nous a permis d’embaucher à ITODYS une ingénieure expérimentée, ancienne de ValoTec. Nous cherchons un ou deux collègues supplémentaires. »
Fondée en 2005, ValoTec est issue du laboratoire Systèmes et applications des technologies de l’information et de l’énergie1 . L’entreprise est spécialisée dans le prototypage, le réglementaire et la fabrication de dispositifs médicaux actifs.
« Nous sommes centrés sur la valorisation technique, explique Jean-Christophe Lourme. Nous regardons comment valoriser les innovations technologiques vers des applications industrielles. Nous voulons combler le gap entre le laboratoire de recherche et l’utilisateur, qu’il s’agisse d’une start-up ou d’un grand groupe. Nous avons en particulier une excellente connaissance réglementaire, ce qui est essentiel pour des dispositifs médicaux qui répondent aux normes de santé. Notre marque de fabrique est d’aller du prototype jusqu’au produit marqué CE. »
MedSensors a encore des verrous à lever avant de mettre ses capteurs de nouvelle génération sur le marché, mais le travail en commun et les échanges d’ingénieurs sauront en venir à bout. « Je suis surpris de ne pas voir davantage de laboratoires communs, note Benoit Piro. J’ai tendance à dire aux chercheurs que l’on retrouve des ressources et des savoir-faire redoutables dans les entreprises, et vice versa. »
- 1SATIE, CNAM/CNRS/CY Cergy Paris Université/ENS Paris-Saclay/Université Paris-Saclay